Congrès Mondial des Études sur le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord

Barcelone, du 19 au 24 Juillet 2010

 < NOT_DEFINED backto RÉSUMÉ DE TOUTES LES PROPOSITIONS

Crises et Mouvements Socio-politiques dans le Monde Arabo-islamique Médiéval (261) - NOT_DEFINED activity_field_Panel
 

· NOT_DEFINED institution: Université de Tunis (Tunisie)

· NOT_DEFINED organizer: Radhi Daghfous

· NOT_DEFINED language: Français

· NOT_DEFINED description: Ce panel se propose d’étudier la problématique générale des crises au sein des sociétés arabo-islamiques médiévales et de leurs différentes manifestations, aux formes plus ou moins violentes. Les sources désignent les crises de façons diverses : du différend (khilâf) ou désaccord (mukhâlafa) à la guerre ( harb) en passant par guerre civile (fitna), mouvement (haraka), révolte ou révolution (thawra). Et ce panel se penchera sur les appellations des différents mouvements sociaux, économiques, politiques, religieux, intellectuels incriminés, ainsi que sur les invariants et les évolutions qui les caractérisent? Les études proposées et sollicitées peuvent porter sur des remous ignorés ou peu connus jusque-là ; elles peuvent également revisiter des crises étudiées, en proposant d’autres lectures ou angles d’attaque, car l’accent sera mis également sur la dimension historiographique. Ainsi, tout en élargissant l’éventail des crises et en observant la multiplicité des facteurs qui les déclenchent, les approches pourront aborder les lexiques des acteurs et/ou des auteurs, la variété des mouvements, leurs causes, leurs programmes et mots d’ordre, leur organisation ainsi que les issues et les répercussions dans les court, moyen et long termes. Par souci de comparatisme, le panel est ouvert aux contributions sur d’autres aires géographiques et chronologiques.

Président: Pr. Radhi Daghfous, président du laboratoire. « La ridda ou apostasie en Arabie : nouvelle lecture à partir de l’exemple yéménite ».
Je me propose d’étudier l’une des crises majeures de l’Islam naissant à savoir la ridda ou apostasie en Arabie. S’agit-il d’un mouvement de remise en cause de l’islam au sens d’apostasie? Ou bien d’un mouvement à caractère plutôt politique qui marque l’opposition d’un certain nombre de tribus en Arabie au pouvoir central de Médine que le prophète Mohammad venait d’instaurer et que le calife Abou Bakr voulait consolider? Ou bien encore d’un mouvement contre le paiement de la zakat?
A partir de l’exemple yéménite je vais tenter une nouvelle lecture de la ridda que tous les auteurs musulmans considèrent comme une révolte contre l’islam en tant que religion et en tant qu’Etat. J’analyserai les trois ridda yéménites:
-d’abord la ridda d’al Aswad al ‘Ansi à San‘a qui entre dans le cadre des « fausses prophéties » ( noubouwat kadhiba )
- ensuite la seconde ridda da Qays b. al Makshouh al Mouradi qui a éclaté au lendemain de la mort d’al Aswad
- et enfin la dernière ridda de Kinda qui a eu lieu au Hadhramawt sous la conduite d’ Al Ash‘ath b. Qays al Kindi .
En dernier je proposerai une explication à tous ces mouvements qui ne sont pas de la même nature et qu’on ne peut pas qualifier en tout état de cause de ridda au sens religieux du terme.

Commentateur: Pr. Mounira Chapoutot- Remadi - membre du labor. «Les mouvements sociaux dans le monde arabo- musulman médiéval: Essai de Typologie»
Nous nous proposons d’étudier ces mouvements en excluant les mouvements religieux. Ces mouvements sont-ils le fait de « classes sociales dangereuses » comme le disait R. Mounier? Il est vrai que les jacqueries paysannes ont souvent explosé ça et là dans toutes les aires géographiques et culturelles. Les nomades pour leur part étaient presque toujours considérés comme des prédateurs en temps de paix comme en temps de guerre. Existe-t-il des espaces plus propices à la révolte comme les villes ? L’entassement et la promiscuité permettaient aux citadins de grandes flambées dans les moments de crise. Les crises économiques, l’oppression fiscale, les épidémies donnaient lieu à des soulèvements.
Cette problématique des soulèvements repose d’abord sur une exploration du vocabulaire : les mots de la révolte, les mots pour nommer les rebelles de même que ceux de la répression retiendront tout d’abord notre attention :
Cette recherche consiste en une sorte d’inventaire des termes employés dans nos sources pour parler et nommer les soulèvements. Une investigation qui interroge aussi le texte coranique pour voir comment on parle des révoltes des peuples mythiques (‘Âd, Thamûd, Loth, Pharaon…) ; comment appelle-t-on les rebelles ?...Les marginaux dans les villes constituaient des contre-pouvoirs ; ils étaient souvent considérés comme des bandits d’honneur et ils avaient leurs rites et leurs emblèmes…
Nous envisagerons ensuite la problématique des soulèvements dans tous les pays du Maghreb et de l’Orient. Même en écartant les soulèvements au nom d’une doctrine considérée comme hétérodoxe par la majorité dominante, le vocabulaire employé pour qualifier ces mouvements, le narrateur – chroniqueur ou autre – ne manque d’emprunter des mots au champ du religieux comme al-dajjâl, l’Antéchrist, al-khârijî, le sortant i.e. celui qui rejette…
Nous pourrons également prendre en troisième lieu quelques études de cas et les analyser comme la révoltes des Zanj (esclaves noirs) du Bas Irak, les luttes interethniques au Caire au sein de l’armée fatimide et de celle de Saladin entre Turcs et Noirs par exemple ; Les révoltes berbères au Maghreb… ; La révolution abbasside…Polysémie de la révolte,

Présentateur: Pr Amor Ben Hamadi- membre du labo. «Les révoltes dans l’occident musulman : l’exemple d’al andalous au Moyen Age»
Partant d’un texte du célèbre historien d’Al-Andalus, Lisān ed-Dīn Ibn al – khatib, où il dénote la fréquence des révoltes durant la période omeyyade de l’histoire de ce pays, et où il propose d’ailleurs quelques explications.
Ce travail essaye d’abord de montrer que ce constat est valable aussi pour les périodes ultérieures du moyen –âge andalous, au point où une question peut se poser : quel était le plus fréquent dans l’histoire d’al-Andalus, l’état de paix et d’accalmie, ou celui de révolte et de trouble ?
L’usage omni présent du mot ″Fitna″ chez les historiens andalous, la profusion du vocabulaire ayant trait aux révoltes chez eux, et l’abondance des boutades illustrent l’insoumission des andalous, sont des aspects qui retiennent l’attention dans l’histoire de ce pays. Je vais essayer dans une autre partie de ce travail de présenter une réflexion à propos des facteurs qui pourraient aider à expliquer cette histoire assez marquée par les révoltes et les mouvements sociaux.

Présentateur: Pr Khalid Kchir - membre du labo. « Etude d’une révolte en Syrie à l’époque omeyyade » Le premier « coup d’Etat » en islam ?
La révolte de Amr ibn Sa‘îd ibn al-‘Ās al-Ashdaq éclate en 69-70h au sein de la dynastie omeyyade en pleine crise, au moment où le calife Abd al-Malik se mobilise pour mettre fin à la révolte de Zufar Ibn al -Hârith al -Kilâbî (pro zubayrite) à Qarqîsya et pour attaquer Mus‘ab Ibn Al-Zubayr (gouverneur de l’Irak pour le compte de son frère Abdallah Ibn al -Zubayr qui s’est proclamé calife à La Mecque).
Amr ibn Sa‘îd se révolte car il s’est senti trahi par son oncle maternel, le calife Marwân Ibn al-Hakam, qui établit le principe dynastique pour ses deux fils et faillit ainsi à son engagement de laisser le pouvoir à Khâlid Ibn Yazîd Ibn Mu‘âwiya puis à Amr ibn Sa‘îd.
Succédant à son père, le calife ‘Abd al-Malik humilie Amr lorsqu’il réclame son droit à la succession. Aussi, décide-t-il de se retrancher à l’intérieur des murs de Damas et de se proclamer calife, fort du soutien des Ashrāf (notables de Damas).
Embarrassé, le calife ‘Abd al-Malik engage des pourparlers avec Amr qui aboutissent à la signature d’un pacte qui stipule, entre autres, le partage du pouvoir entre les deux.
Mais de facto, ‘Abd al-Malik n’a pas pardonné à Amr. Il décide de s’en débarrasser en l’égorgeant de ses propres mains, suite à la réticence de ses frères.
Il bannit les enfants et les frères du défunt qui rejoignirent Mus‘ab Ibn Al Zubayr en Irak. Par l’extermination d’un prétendant proche, ‘Abd-al-Malik annonce la couleur de ce que sera sa politique envers l’opposition.
Nous nous proposons de revisiter cet événement pour en mesurer l’ampleur dans le cadre de l’histoire politique omeyyade.

Présentateur: Pr Fawzi Mahfoudh - membre du labo. « L’apport de l’archéologie pour la connaissance des révoltes dans le monde musulman »
Les historiens contemporains utilisent souvent des textes pour l’étude des révoltes et des conflits qui ont secoué l’Ifriqiya médiévale. Or, à bien observer, on constate que les documents archéologiques apportent eux aussi une contribution de taille à la connaissance des conflits. Les documents archéologiques sont de nature diverse : il y a d’abord les inscriptions et les pièces de monnaies, mais il y a aussi les vestiges archéologiques et différents objets qui peuvent nous éclairer sur des épisodes parfois négligés des sources. Tel est le cas des premiers temps de la conquête. Le document archéologique est quelquefois le seul à même de nous renseigner sur un fait militaire ; son utilité se révèle indispensable lorsque le texte littéraire nous fait défaut ou lorsqu’il est difficile à interpréter.

Présentateur: D. Mohamed Houbaida, Université-Maroc, Etat et révoltes dans le Maroc Médiéval
Notre communication a pour objectif de mettre l’accent, à partir des textes médiévaux, mentionnant les mouvements sociaux dans différentes régions du Maghreb, sur deux points essentiels.
Premièrement, les révoltes populaires traduisent l’ensemble du système social dominant, à savoir l’organisation de la société, la hiérarchie entre les gens et les représentations. La société marocaine, à l’instar des autres sociétés dans le monde arabo-musulman médiéval, était une société d’ordres où les gens se répartissaient, horizontalement, en trois catégories sociales, à la fois mêlées et distinctes : la ‘amma (gens du commun), la khassa (élite) et la khassa de la khassa (l’élite de l’élite). De manière générale, les gens vivaient ensemble, malgré les disparités économiques. Toutefois, comme l’a bien démontré l’anthropologue Karl Polanyi, le mode de vie médiéval, pré-moderne, encadré par des formes de solidarité et de « réciprocité », s’écroule sous l’effet d’une fiscalité dévorante, mais aussi à cause des troubles politico-militaires. Résultat : la vie sociale est perturbée, les formes de solidarité sont détériorées, les gens sont frustrés et facilement entraînés dans des tumultes. Suivant des prédicateurs errants, les émeutiers, que les chroniques qualifient d’ignobles, sa‘âlik, d’ignorants, juhâl, de crapules, awbâsh, sèment troubles et désordres dans les campagnes comme dans les villes.
Deuxièmement, l’étude des révoltes permet une approche comparative par rapport aux troubles sociaux de l’Occident médiéval, notamment en ce qui concerne les processus de déclenchement, les référents culturels, les aboutissements. A ce titre, il est particulièrement intéressant de comparer la révolte du Ghomari au Maroc au temps des Almohades, et la jacquerie en France au temps des Capétiens.